M’Vila, nouveau porte-drapeau

Dans son édition de vendredi dernier, le magazine France Football consacrait un mini-dossier au Stade rennais et à la première place qu’occupent les "Rouge et Noir". En une, qui de mieux pour illustrer la réussite bretonne que le visage de Yann M’Vila ? En titre, le « Et si ça durait ? » semble autant s’interroger sur le devenir de l’équipe rennaise que sur celui de son milieu de terrain.

Une belle revanche en tout cas pour M’Vila, dont la présence dans les trente de Domenech était considérée comme une anomalie dans les colonnes de ce même magazine en mai dernier. Péremptoire, le commentaire affirmait alors que le jeune rennais n’avait tout simplement pas encore le niveau pour prétendre porter le maillot bleu.
Aujourd’hui, changement de discours. À travers la confiance de Laurent Blanc, à travers ses bonnes performances depuis ses débuts en équipe de France, le regard porté par la presse nationale sur le jeune milieu de terrain a significativement évolué.

Scepticisme, curiosité, popularité

D’abord sceptique, celle-ci semblait observer de façon presque inquiète les prestations du jeune joueur. « M’Vila, propre ou transparent ? », s’interrogeait ainsi L’Équipe quelques jours après France - Biélorussie, qualifiant sa prestation de « contrastée ».
Après ce round d’observation, comme si les bonnes dispositions du Stade rennais en championnat adoubaient in fine les choix de Blanc, venait le temps de la curiosité. Comment ce jeune de vingt ans, une trentaine de matchs de Ligue 1 au compteur, était-il parvenu à s’installer aussi haut aussi rapidement ? Portrait revenant longuement sur son enfance et sur sa formation (France Football), interview croisée avec son ami Mamadou Sakho (Le Parisien), sollicitation des avis élogieux de Frédéric Antonetti et de Patrick Rampillon (RMC), difficile pour l’amateur de football lambda d’échapper à l’émergence du phénomène.

À Rennes, la révélation de la saison dernière a pris de l’étoffe. L’espoir que Guy Lacombe laissait désespérément en CFA s’est mué en l’un des joueurs les plus populaires de l’effectif rouge et noir. « Quand je suis passé de rien à la Ligue 1, il y a eu un bouleversement, remarquait M’Vila dans les colonnes du Parisien, le 4 octobre dernier. Mais là, cela n’a rien à voir. C’est énorme ».
Il y a un mois, lors de la présentation de l’effectif aux abonnés du club, le milieu de terrain a pu mesurer la montée en flèche de sa cote de popularité, pour laquelle quelques matchs en Bleu ont fait autant qu’une trentaine de rencontres en « Rouge et Noir ». Pour un peu, le profane pourrait presque penser que le leader de l’effectif rennais est ce jeune joueur de l’équipe de France dont on parle tant, et non pas le grand gaillard sénégalais placé derrière lui en défense. Une sorte de nouveau porte-drapeau, en quelque sorte.

« Rennes peut faire partie des grands clubs »

Reste la dangereuse tentation de se croire trop vite arrivé, au risque de demeurer éternellement le « joueur de demain » qui est aujourd’hui unanimement loué. M’Vila s’en défend, expliquant que la présence de sa famille - mère, sœurs, femme et enfants - à ses côtés est le meilleur moyen d’éviter de sombrer dans la prétention. « Vivre avec mes proches me rassure, expliquait M’Vila sur les ondes de RMC il y a quelques jours. Cela m’empêche d’avoir la grosse tête. Si cela devait arriver, ma mère ou ma femme me dirait tout de suite de me calmer et de rester tel que je suis ».
Sur les terrains, le néo-international a encore beaucoup à apprendre, et beaucoup de potentiel à exprimer. « Offensivement, il doit apporter bien plus. Il peut percuter, expliquait ainsi Pierre Dréossi dans les colonnes de L’Équipe. Chez les jeunes, je l’ai vu faire la différence balle au pied et dans son jeu de passe. Son évolution est là, et ce n’est pas parce que tu te retrouves devant la défense que tu ne peux pas le faire ». Comme guide, l’expérimenté Stéphane Dalmat s’est lui déjà posé comme un candidat pour « encadrer » la montée en puissance de son coéquipier (voir précédemment).

Encadré oui, mais pour combien de temps à Rennes ? Sitôt après la rencontre Norvège - France, Jérôme Leroy n’hésitait pas à exhorter M’Vila à changer de club pour progresser. « À Rennes, il stagnera. Régressera peut-être, n’hésitait pas à affirmer l’ancien parisien. Il a un tel potentiel qu’il doit évoluer avec des joueurs de très haut niveau ».
L’été prochain, il est probable que de nombreux clubs chercheront à s’attacher ses services. Ayant le joueur sous contrat jusqu’en 2014, le Stade rennais aura cependant toutes les cartes en main pour le retenir. M’Vila, qui « rêve - comme la plupart de ses collègues - d’aller dans un grand club », a tout le temps nécessaire pour matérialiser ses ambitions et, pourquoi pas, pour contribuer au passage à faire grandir son club formateur. « En France, il y a de grands clubs. Rennes peut en faire partie », déclarait-il récemment. Chiche ?