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17 mars 2023 | à 09h28

ENTRETIEN / Cheikh N’Diaye : « On se disait « À 10 contre Paris, combien on va prendre ? »

Gardien remplaçant du Stade rennais durant six saisons, Cheikh N’Diaye a vécu une soirée folle le 17 novembre 2012, lorsque entré en jeu en cours de match au Parc des Princes, il permettait au SRFC de s’imposer 2-1 face au PSG, à 9 contre 11. Pour SRO, le héros d’un match épique, aujourd’hui au Stade Briochin, revient sur ce moment unique, il y a 10 ans.

ENTRETIEN / Cheikh N’Diaye : « On se disait « À 10 contre Paris, combien on va prendre ? »

Le 17 novembre 2012, on joue la 27e minute et Benoît Costil prend carton rouge. Qu’est-ce qu’il se passe dans ta tête à ce moment ?

Sur le coup tu ne t’y attends pas, tu vas avoir cette petite panique, la surprise. Mais c’est une panique qui passe vite. Le coach Frédéric Antonetti était excité sur le banc, moi derrière j’avais le petit sourire. Tu avais hâte de rentrer en fait. Christophe Revel était derrière moi en me motivant, en me disant de ne pas m’inquiéter, que ça allait bien se passer. Avec le sourire, en le regardant, je lui disais « ne t’inquiètes pas ». Après, ça l’a fait.

La panique ne dure vraiment pas longtemps, finalement.

Non, pas longtemps. Tu es sur le banc, au Parc des Princes, c’est un truc de ouf. Tu vois quelque chose que tu n’attendais pas. Tu as fait des bancs, des matchs et ce n’est jamais arrivé, il n’y a jamais eu de suspension, et là, au Parc des Princes… Tu vois le carton rouge, ton coeur il bat. Bim, bim, bim ! Après basta, il faut y aller, et ça s’est super bien passé. Ce sont des moments inoubliables.

Comment vit-on les rencontres en tant que gardien numéro 2 ?

Quand on est 2e, 3e, même à l’entraînement, on dirait que tu vis tout le temps la concurrence. Tu es toujours plus concentré, déterminé. Tu donnes tout, c’est notre rôle. En même temps, tu fais travailler le premier gardien qui ne va jamais lâcher, ça va le motiver. Le but du 2e ou 3e gardien c’est d’emmener le premier gardien à être prêt. Quand les matchs arrivent, tu es concentré, tu es prêt à rentrer même si la plupart des matchs tu ne rentres pas. Mais c’est notre rôle, toujours prêt. C’est un poste où ce n’est pas pareil, ce n’est pas facile non plus.

Que se passe t-il quand Benoît Costil sort du terrain ?

Je le comprends, sur le coup, carton rouge contre le Paris Saint-Germain… Quand il sort j’avais envie de lui dire quelques mots, ou qu’il me dise « t’en fais pas, c’est ton match », des trucs comme ça. Après, le carton rouge c’est de l’énervement. On s’est croisés vite fait, mais j’ai compris, ce n’est pas méchant. C’était difficile de parler pour lui. On s’entendait bien Ben et moi, on en a parlé (après), on en a rigolé, il m’a dit « bien joué ». C’est un bon gars, il était content pour moi, j’ai apprécié, c’était top.

Comment vit-on ce genre de moments, rares, quand ils arrivent ?

C’est simple, tu as envie que ça continue. C’est tellement bon ces moments-là. Imagine, tu es 2e ou 3e gardien, pendant toute une année tu es sur le banc et tu te donnes à fond pour pouvoir avoir un peu de temps de jeu. Quand tu gouttes à ça, tu n’as plus envie de ressortir, car on s’entraîne pour jouer. Surtout arrivé à un certain âge, tu es prêt à jouer. Au match suivant contre Evian, j’ai joué 90 minutes, et tu as encore plus envie de jouer quoi. Après, c’était mon rôle, il y avait une hiérarchie.

Ce match contre Évian (défaite 0-1 quelques jours plus tard), avait-il autant de saveur que celui du PSG ?

Pour moi, oui. Pour les autres, je ne sais pas. J’étais deuxième, pour moi c’était pareil, Paris au Parc ou Évian, j’avais envie de jouer, donc c’est pareil.

"Je me suis levé avec le sourire"

Quels sont tes souvenirs de ce match face au PSG ?

Quand Benoît prend le rouge, et que je vois le coach Frédéric Antonetti sur le banc, c’était marrant. Je me suis levé avec le sourire. C’est mon ressenti, mais quand tu voyais le coach excité, fou, je vois Christophe (Revel) qui se lève, sur le coup j’ai souri. Quand je les voyais, je me disais que c’était comme s’ils n’avaient pas confiance en moi. Vu que c’est rouge, on va jouer à 10, et même nous dans notre tête, on se disait « à 10 contre Paris, mais combien on va prendre ? ». Moi je me rappelle de ça, et ça m’a fait rigoler. (Le Stade rennais terminera finalement à 9 contre 11, après l’expulsion de Jean II Makoun).

Je me connais, je sais que j’étais prêt, que ça faisait des années que je bossais pour ça, mes collègues me connaissaient, et m’ont dit « vas-y, montre leur ». Christophe (Revel) me motivait quand je me changeais, et avec le sourire je lui ai dit « t’inquiètes, ça va bien se passer ». Je ne vais pas dire que j’étais sûr de moi, mais je n’ai pas eu peur. Dans ma tête, c’était juste un match. Je suis rentré avec la voix, j’ai crié sur les gars, « on lâche rien », pour les motiver et leur montrer que j’étais là.

Tu fais plusieurs arrêts déterminants. Est-ce que tu t’es surpris sur ce match ?

Franchement, je suis rentré avec une envie, avec cette voix dans la tête qui me dit « putain, enfin, c’est ton heure ». Quand on est 2e, 3e, ce rôle est tellement difficile. Quand tu as ta chance, il faut la prendre. Il ne fallait pas rentrer avec la panique ou le stress, sinon on allait prendre 15 buts.

Est-ce qu’on t’en reparle de ce match ?

Tous les jours, rien qu’avant-hier encore (l’entretien a été réalisé le 10 mars, ndlr). Je vais quelque part jouer un match de National, je croise du monde, des anciens Rennais, des vieux ou des petits à qui le papa parle de ce match. On m’en parle tout le temps.

Pourtant, le 21 avril 2009, tu fais aussi un match important à Grenoble en demi-finale de coupe de France (victoire 1-0 et qualification pour la finale), en remplaçant Nicolas Douchez à la mi-temps. C’est un match qui t’a moins marqué ?

Je m’en rappelle aussi, mais c’est moins marquant. Quand on parle du PSG de l’époque, ça commençait les gros transferts. Zlatan (Ibrahimovic) était là mais suspendu, il y avait des gros calibres, (Javier) Pastore, (Kevin) Gameiro, (Guillaume) Hoarau… C’était une grosse équipe, et c’est vrai que ça marque, au Parc des Princes en plus. Quand je vois le Parc des Princes, je repense toujours à ça. Mes enfants me disent « Papa regarde c’était ici », ça fait plaisir.

Tu as joué 7 matchs avec le Stade rennais, dont 2 marquants. Est-ce un bilan qui te convient ?

Déjà c’est pas mal, je ne m’attendais pas à ça. Je supporte toujours le Stade rennais, je le dis haut et fort. Par rapport à ma carrière, j’aurais voulu plus bien sûr, après c’est comme ça. C’était mon destin. Je ne regrette pas, je ne regrette jamais. Tout ce que j’ai eu c’est grâce au Stade rennais, il faut le dire. Je n’ai que de bons souvenirs.

Après la victoire face au PSG en 2012, tu avais dit que ce n’était pas le match de ta vie. Dix ans plus tard, tu confirmes ?

Mon plus gros match, et je n’ai pas joué, c’était la demi-finale de coupe d’Afrique des Nations 2006 contre l’Egypte (7 février 2006, défaite du Sénégal 1-2, ndlr). Je ne peux pas l’expliquer, c’était énorme. J’avais 20 ans, je rentre dans le plus grand stade d’Egypte (Stade international du Caire, ndlr), je peux vous dire, si tu n’es pas costaud, tu tombes dans les pommes. C’était tellement impressionnant… Mon coeur battait à fond, heureusement que je n’ai pas joué ce match (rires) ! Ce sont ce genre de matchs qui font que quand tu vas au Parc des Princes ou dans un autre stade, ce n’est rien, car tu as vécu pire.

Crédit Photo : Stade Briochin

Le match :

Le 17 novembre 2012, le Stade rennais affronte le Paris Saint-Germain au Parc des Princes, et l’emporte 2-1 au terme des 90 minutes. Romain Alessandrini ouvre le score (13e), avant que Nenê ne lui réponde (21e). Benoit Costil est expulsé (27e) et Cheick N’Diaye remplace Mevlut Erding, pour rejoindre une équipe réduite à 10, puis à 9 suite à l’expulsion de Jean II Makoun (52e). Avant cela, Julien Férêt avant déjà donné l’avantage au SRFC (35e). Rennes s’impose 2-1 au terme d’un match fou.

Vos réactions (6 commentaires)Commenter
Costard 16 mars 2023 à 10h48

March de mémoire, inoubliable, comme France Allemagne de 1982 à Séville et la 2ème finale le jeudi de l’Ascension 1965 au Parc des Princes, déjà....

Marcel Loncle16 mars 2023 à 12h37

Interview très intéressante car elle décrit ce que Cheikh a vécu lors d’un tel match. Il fallait avoir les nerfs sacrément solides. C’est forcément l’expérience d’une vie quoi qu’il dise. En tout cas, expérience réussie, avec brio en plus. Chapeau !

Lucien 16 mars 2023 à 12h45

Meilleur que Gomis

Kévin34 16 mars 2023 à 19h18

J’etais à ce match ,invité en tribune « Club Paris » au milieu de footixs du PSG.
La seule fois de ma vie , mais c’était marrant .
Quand N’Diaye est rentré, j’ai dit à mes voisins : « ce gars , c’est un vrai chat ,il ne va pas prendre un but ! »
J’étais fier de mon écharpe du SRFC .
Mais je l’ai ramassée pour reprendre le métro, on ne sait jamais ,il sont un peu c... là bas.
Allez Rennes
Kévin34

Erwan2p17 mars 2023 à 08h04

C’est ce match où Salma Hayek a dit « Chapeau bas Rennes ! »

Xavier17 mars 2023 à 11h10

A l’époque il y avait un grand joueur au stade rennais,
Julien Féret, balle au pied et une vision de jeu : un régal !

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