Stade rennais - Angers : l’oeil de Théo Rauzy

Un match de patron. Face à des Angevins ayant bien révisé leur dossier mais trop respectueux pour bousculer la hiérarchie, les joueurs de Bruno Genesio n’ont eu qu’à apposer leur tampon sur le contrat pour valider les 3 points.
Une victoire 2-0 sans trembler qui, à défaut d’avoir enthousiasmé le Roazhon Park, reste la bienvenue à l’aube d’une fin de saison chargée (et très relevée). Analyse.

LES COMPOS :

Rennes (1-4-4-2) : Gomis – Meling, Aguerd, Omari, Traoré – Terrier, Santamaria, Martin, Bourigeaud – Laborde, Guirassy

Angers (1-5-3-2) : Petkovic – Doumbia, Ebosse, Traoré, Mendy, Ounahi – Fulgini, Mangani, Bentaleb – Boufal, Jakolis

Comme face à Troyes, l’absence d’un milieu (Majer) est compensée par un passage au 1-4-4-2 avec la titularisation de Guirassy. Aucune surprise par ailleurs.
En face, Baticle démarre dans un schéma traditionnel pour le SCO avec une défense à 5, le jeune Ounahi, habituel milieu, remplaçant Jimmy Cabot au poste de piston. Mangani démarre en pointe basse du milieu. A noter également l’absence d’Ali Cho devant, lui qui avait fait si mal aux Bretons lors du match aller.

LE MATCH :

Contrairement aux dernières sorties des Rennais à domicile, le spectacle ne fut pas toujours au rendez-vous Dimanche et Rennes s’est procuré moins de situations franches qu’à l’accoutumée (seulement 4 tirs cadrés au final, plus faible total depuis 3 mois). Quelques raisons à cela :

• Un déchet technique trop important : Les Rennais ont eu un déchet technique inhabituel, que ce soit dans les remises ou même parfois sur des passes simples comme en début de match sur l’action amenant à la frappe de Boufal où on compte 2 erreurs techniques grossières successives. Suffisance, manque de concentration, fatigue ?
• L’absence d’un créateur comme Lovro Majer pour fluidifier le jeu rennais s’est faite ressentir : Malgré les progrès notables de Santamaria à la création, sa capacité à tenir le ballon et à attirer plusieurs adversaires sur lui pour trouver des décalages a manqué.
• La volonté d’Angers de défendre haut : Toutes les équipes ne le font pas au Roazhon Park, mais on peut noter que les hommes de Baticle ont eu la volonté de gêner les relances adverses dès lors que le ballon arrivait dans les pieds de Gomis (sans toutefois avoir la prise de risque ou l’agressivité nécessaire pour récupérer le ballon dans le camp rennais). Cela a forcé le Sénégalais à jouer long régulièrement. Pour autant, comme à Montpellier, ce jeu long s’est révélé plutôt efficace avec l’aisance de Laborde à prendre la position sur son défenseur avant de remiser/dévier ainsi que grâce au jeu aérien de Guirassy.
• La grosse densité axiale angevine : De façon un peu similaire que face à Lens en janvier dernier où les Bretons avaient été gêné par une défense à 5 et un milieu fermant le jeu intérieur, les Angevins ont orienté les attaques adverses sur les côtés, empêchant les Rennais de trouver des espaces entre les milieux et défenseurs centraux adverses, zone préférentielle d’un Terrier moins en vue dimanche.

Cependant, les Angevins ont considérablement manqué d’agressivité sur le porteur pour récupérer le ballon plus souvent et n’ont pas eu les armes offensives pour contrer avec un Boufal peu actif et un Jakolis transparent, tandis que les Rennais se montraient sérieux au pressing et au contre-pressing.

Par ailleurs, si les Angevins ont très bien fermé l’axe, les joueurs de Génésio ont su exploiter d’autres espaces…

VIS MA VIE DE PISTON AU SCO D’ANGERS

Si les Rennais n’ont pas réussi à franchir les dernières lignes adverses via l’axe central, ils ont bien exploité les surnombres sur les côtés face à des pistons angevins livrés à eux-mêmes.
En effet, en plus de devoir jouer un rôle de défenseur en fermant sur les ailiers adverses quand le ballon était à l’opposé, Doumbia et Ounahi étaient censés sortir au cadrage jusqu’aux latéraux adverses quand le ballon était de leur côté. Partant de trop loin, face à des latéraux Bretons intelligemment situés un peu plus bas que d’habitude ils sont très souvent arrivés à contre-temps, laissant à Traoré et Meling trop de temps pour s’organiser comme ici :

Ounahi part de très loin et arrive avec un temps de retard sur Meling. Le Norvégien rentre à l’intérieur sur son pied droit, prenant à contre-pied Ounahi.

Ou là :

Encore une fois, Ounahi part de très loin et arrive avec un temps de retard, laissant Meling rentrer à l’intérieur. Ce dernier trouve une très belle passe vers l’avant avec son pied droit jusqu’à Laborde, Terrier ayant intelligemment laissé passer le ballon.

A noter sur ces situations l’aisance de Meling pour jouer vers l’avant avec son pied droit quand il rentre à l’intérieur, ce que Truffert, gaucher exclusif a plus de mal à faire.

Par ailleurs, ils ont défendu régulièrement à un contre deux plus bas sur le terrain et n’ont pas pu compter sur l’aide de Fulgini et Bentaleb venant eux aussi de trop loin depuis l’axe pour les aider à gérer les infériorités numériques. On le remarque ici :

Pas de joueur pour suivre le dédoublement de Traoré. Doumbia doit défendre deux joueurs en même temps. Bourigeaud en profite et rentre sur son pied gauche pour une frappe écrasée.

Ou là :

Doumbia en 1v2 contre Traoré et Terrier. Ne pouvant pas sortir au cadrage sur le Malien, ce dernier a tout le temps d’ajuster sa passe en profondeur pour Guirassy pour une belle occasion Rennaise.

De plus, les Rennais se sont efforcés d’occuper l’espace dans leur dos sitôt qu’ils sortaient au cadrage, un espace très mal couvert par Mendy notamment, dont l’ancien directeur du centre de formation à Nantes Samuel Fenillat disait qu’il le préférait au milieu car « il n’a pas les caractéristiques pour rester en place, GERER LA COUVERTURE ». Or, on peut s’apercevoir plusieurs fois que ce dernier a très mal couvert Ounahi, préférant jouer le hors-jeu ou mettant du temps à démarrer pour couvrir le dos de son partenaire. On peut le voir ici :

Ounahi un peu loin de Meling. Laborde part dans le dos du piston angevin mais n’est pas suivi par Mendy qui préfère faire un pas vers l’avant pour jouer le hors-jeu.

Là :

Meling se projette dans le dos de l’espace laissé par Ounahi, sorti sur Bourigeaud. Mendy préfère faire un pas vers l’avant pour jouer le hors-jeu. Par chance, Bourigeaud revient vers l’intérieur et ne sert pas Meling

Ou de l’autre côté, cette fois-ci avec Ebosse :

Doumbia sort au cadrage sur Bourigeaud, Traoré se projette dans son dos. Ebosse est trop loin pour assurer une bonne couverture. Heureusement pour les Angevins, Bourigeaud rate une passe facile

BATICLE, LE VISIONNAIRE

Enfin, on peut s’étonner de cette stratégie de laisser ces infériorités numériques sur les côtés en se remémorant les propos d’un Baticle pourtant très lucide avant le match, évoquant la capacité des Rennais à attirer l’adversaire d’un côté, basculer de l’autre et finir dans une troisième zone. En somme, la définition des deux buts Rennais, sur lesquels on retrouve pourtant tous les maux angevins évoqués plus haut :

Début de l’action depuis la droite où Bourigeaud sauve miraculeusement un ballon qui allait sortir en touche. Le jeu bascule à gauche. Ounahi se retrouve en 1v2 et se fait fixer. Laborde occupe l’espace dans le dos du piston angevin tandis que Mendy (entouré) ne prend pas la couverture. Meling rentre à l’intérieur et sert Laborde de son pied droit. L’ex-Montpelliérain rebascule le jeu au deuxième poteau pour un Bourigeaud laissé seul (l’aurait-il été si les Angevins avaient joué avec 2 joueurs de couloir ?).

Idem sur le deuxième but :

Rennes fixe côté droit puis le jeu bascule à gauche jusqu’à Truffert. Ounahi se fait fixer et reste encore dans une position d’entre-deux inutile. Doku part dans son dos tandis que Mendy (entouré) ne prend pas la couverture d’Ounahi. Doku centre pour Laborde qui marque facilement.

L’analyse d’avant-match fut donc bonne, la stratégie un peu moins, ce qui fut amplifié par le positionnement d’Ounahi a un poste totalement inhabituel et de Mendy à un poste qui n’est pas son rôle préférentiel…

A la semaine prochaine !

Par Théo Rauzy

Crédit Photo : Prime Video